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Fiscalité

Novembre 2024 – En immobilier, est-il mieux d’investir personnellement ou par l’intermédiaire d’une société?

21 novembre 2024
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Il s’agit d’une des questions les plus couramment posées. Il faut bien analyser la situation avant d’y répondre. Du point de vue fiscal, des règles spécifiques existent et peuvent affecter la notion d’intégration de l’impôt entre une société et un particulier. Donc, il est important de bien comprendre les principes découlant d’un tel investissement au niveau corporatif. Certaines définitions se doivent d’être abordées.

Entreprise exploitée activement (EEA)

Une EEA est une société autre qu’une entreprise de placements déterminés (EPD) et qu’une entreprise de prestation de services personnels (EPSP), mais qui inclut un projet comportant un risque ou une affaire à caractère commercial. Le revenu provenant d’une EEA, mieux connu sous le nom de revenu d’entreprise exploitée activement (REEA), rend admissible le revenu à la déduction pour petite entreprise (DPE). La DPE permet de bénéficier d’une réduction du taux d’imposition des sociétés.

Entreprise de placements déterminés (EPD)

Une société qui se qualifie d’EPD se voit refuser son droit à la DPE. Une EPD est une entreprise qui effectue de la location de biens immobiliers. Le but principal d’une EPD est de gagner un revenu de biens. Le revenu de biens se définit par du revenu d’intérêts, de dividendes, de loyer, de redevances, et est autre qu’un revenu provenant de la location de biens mobiliers :

  • Le revenu de biens est imposable à raison de 50,17 % (taux global fédéral et Québec). Il comprend un impôt temporaire de 30 2/3 % et est récupérable lors de versements de dividendes autres que déterminés par la société à ses actionnaires.
  • Il est cependant possible de s’exclure de la définition d’EPD et de se qualifier d’EEA lorsque :
    • La société emploie plus de cinq employés à temps plein tout au long de l’année; ou
    • Une autre société associée à la société lui fournit au cours de l’année des services de gestion, d’administration, de nature financière, d’entretien ou tout autre service semblable et qu’il aurait été raisonnable de considérer que la société aurait eu besoin de plus de cinq employés à temps plein si ces services ne lui avaient pas été fournis; ou
    • Le revenu de location de biens immobiliers provenant d’une société associée qui déduit la dépense de loyer contre du REEA.

À titre d’illustration

Madame A gagne un revenu de 100 000 $ annuellement et paie 36,12 % d’impôts sur chaque dollar supplémentaire gagné selon sa tranche de revenu actuel. Elle souhaite acquérir un immeuble locatif résidentiel. Une de ses connaissances lui suggère de faire son investissement via une société afin de bénéficier des taux d’imposition inférieurs offerts par la société. Étant son premier investissement immobilier, en optant pour l’utilisation d’une société, madame A ne peut pas s’exclure de la définition d’EPD. Elle ne peut pas entrer dans la définition d’EEA. Elle serait donc visée par un taux d’imposition global de 50,17 %. À l’inverse, en effectuant un investissement personnel, tout revenu supplémentaire gagné par madame A suit la progressivité des taux d’imposition. Afin de bien comprendre les distinctions entre les deux options qui s’offrent à elle, voici un résumé des avantages et des inconvénients :

Investissement par l’intermédiaire d’une société

  • Avantages :
    • L’utilisation de la société permet de protéger le patrimoine de madame A puisque la société est une entité distincte. Donc, une poursuite contre la société n’est pas une poursuite contre madame A.
    • Elle facilite l’intégration d’actionnaires. Le fait de détenir les actions de la société plutôt que les titres de propriété directement permet un transfert plus simple. En effet, la possibilité de vendre ses actions plutôt que l’immeuble en soi permet d’éviter toute récupération d’amortissement/perte finale sur le bien immobilier. Cependant, en immobilier, rares sont les acheteurs qui désirent acheter les actions au lieu de l’immeuble, car en achetant les actions, le passé (soit l’historique) de la société suit et peut causer d’éventuels problèmes dans le futur.
  • Inconvénients :
    • Lors de la création d’une société, celle-ci peut rarement se financer elle-même. Il est souvent nécessaire que l’actionnaire endosse les emprunts de la société avec des biens personnels. La protection du patrimoine personnel de madame A, se voit donc impactée.
    • L’utilisation d’une société apporte également un lot de complexité du point de vue de la conformité. Il est nécessaire de produire une déclaration d’impôts distincte de celle du particulier, et ce, à chaque année, de même, que des coûts de mise en place qui sont à prévoir. Une tenue de livres est nécessaire, car les autorités fiscales demandent non seulement un état des résultats, mais un bilan doit également être fourni. Un compte bancaire de société, séparé du compte personnel, doit aussi être ouvert.
    • Dans bien des cas, comme dans celui de madame A, il n’est pas possible de rencontrer les exceptions d’EPD. Ainsi, le revenu net de loyer (soit le revenu généré diminué des dépenses liées à l’immeuble) est imposé à un taux supérieur à celui d’un investissement personnel. Bien que cet impôt comprenne un impôt temporaire, celui-ci est récupérable par la société seulement lors de versements de dividendes en faveur des actionnaires. Dans le cas de madame A, la récupération de cet impôt temporaire risque de prendre quelque temps. Un investisseur immobilier souhaite souvent réinvestir ses profits dans des projets futurs.
    • En outre, les pertes locatives générées dans la société se qualifient de pertes autres qu’en capital, elles sont donc reportables contre tout revenu (rétrospectivement de 3 ans et prospectivement de 20 ans). Dans le cas d’un premier investissement comme celui de madame A, des investissements de départ sont souvent à effectuer sur l’immeuble. La rentabilité survient plutôt au cours des années. Il y a donc plus de chance que les premières années génèrent des pertes locatives, et qu’ainsi, aucune somme ne soit reportable avant quelques années.
    • Lorsqu’un actionnaire souhaite utiliser les sommes gagnées dans la société personnellement, celles-ci lui sont imposables.

Investissement en tant que particulier

  • Avantages :
    • Celui-ci permet de bénéficier des taux d’imposition progressifs des particuliers. Comme dans le cas de madame A, ce n’est pas tous les particuliers qui sont imposés au plus haut taux d’imposition de 53,31 %.
    • Une seule déclaration d’impôts est nécessaire annuellement, soit celle du particulier. En effet, il n’y a aucune distinction entre le particulier et l’investissement. De cette façon, il est plus facile d’utiliser les liquidités du projet ou même lorsque l’on souhaite injecter des sommes dans celui­‑ci.
    • Les premières années étant moins profitables, des pertes locatives sont courantes. Celles-ci sont déductibles à l’encontre du revenu gagné par madame A. Lors de premiers investissements immobiliers, il est souvent plus facile d’obtenir du financement personnellement plutôt que directement dans la société.
    • Le coût des assurances et du taux d’intérêt de l’hypothèque est souvent moins élevé pour une détention personnelle.
    • Il est possible d’avoir un investissement immobilier de départ personnel, et par la suite, de le transférer facilement dans une société.
  • Inconvénients :
    • L’investissement immobilier fait partie du patrimoine personnel de madame A, elle en est donc pleinement responsable.
    • Dépendamment du revenu annuel du contribuable, il se peut qu’il se rapproche du plus haut palier d’imposition des particuliers.
    • La disposition d’un immeuble locatif génère habituellement une récupération d’amortissement, en plus d’un gain en capital pour le contribuable. Cela s’ajoute à ses autres revenus de l’année de la vente, donc peut entraîner un taux d’imposition plus élevé.
    • L’intégration d’autres membres de la famille à titre de propriétaire des immeubles entraîne un coût d’impôt alors qu’avec la société par actions, un gel successoral peut être réalisé afin de reporter l’imposition.

Le cas présenté est un cas simple et théorique. Une multitude de possibilités existent lorsque vient le temps d’effectuer un investissement immobilier. Par exemple, un entrepreneur qui est déjà incorporé pour des opérations autres que l’immobilier et ayant déjà des liquidités dans une société pour se porter acquéreur d’un immeuble aura probablement plus d’avantages d’acquérir un immeuble dans une société au lieu d’avoir à s’imposer sur une sortie de fonds de sa société par actions en salaires ou dividendes.

En résumé, chaque option présente ses propres défis et nuances, une analyse spécifique et adaptée se doit d’être effectuée à chaque fois.

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Pour en savoir davantage, contactez l’équipe de fiscalité au 1 866 833-2114.

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