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Insolvabilité

Juin 2024 – La Loi sur la faillite et l’insolvabilité : un outil pour les créanciers?

18 juin 2024
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Pendant la période de pandémie, l’insolvabilité des entreprises a connu un ralentissement important. Depuis un an, la tendance est à l’inverse, le nombre de dossiers d’insolvabilité commerciale a augmenté de plus de 56 % d’avril 2023 à mars 2024. Le rebond concerne essentiellement des entreprises qui ont été incapables de rembourser le compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. Également, durant la pandémie, les gouvernements et les créanciers en général ont été indulgents et ont mis leurs mesures de perception en veilleuse; certaines entreprises insolvables ont donc pu retarder le dépôt d’une procédure d’insolvabilité. La croissance des insolvabilités commerciales est un retour de balancier inévitable.

Actuellement, la situation n’est pas parfaitement rose pour les entreprises! La croissance des coûts d’opération tels que les matières premières et les salaires, ainsi que l’augmentation des intérêts sur les emprunts, présentent des défis en ce qui concerne la rentabilité. Parfois, elles-mêmes aux prises avec des clients qui ne paient pas ou qui paient plus tard, beaucoup d’entreprises se voient dans l’obligation de retarder eux-mêmes les paiements à leurs fournisseurs pour équilibrer leurs liquidités; c’est un cercle vicieux.

Aujourd’hui plus que jamais, la gestion des comptes clients est un enjeu important dans la saine administration d’une entreprise.

Les outils « standards » de gestion de comptes clients

Voici les éléments essentiels à mettre en place dans la gestion quotidienne des comptes clients :

  • Effectuer une analyse initiale scrupuleuse des nouveaux comptes. Dans la mesure du possible, obtenir le dossier de crédit et les états financiers.
  • Signature d’un contrat d’ouverture de compte avec des conditions de paiement et de défaut claires. Obtention d’une garantie (réserve de propriété, hypothèque ou cautionnement personnel).
  • Mettre en place un système de révision mensuelle des tendances de paiement pour les clients d’importance.
  • Établir des mesures d’intervention graduées et les délais attachés à chacune d’elles :
    • Courriel, contact téléphonique, mise en demeure, agence de recouvrement ou demande au tribunal.
  • Établir le processus de règlement lorsqu’un compte est en souffrance :
    • Entente échelonnée (fixe ou en fonction du niveau des nouveaux achats, par exemple : 5 % de la nouvelle facture payable en supplément de cette dernière afin de réduire le vieux compte).
    • Paiement avant livraison ou production.
    • Fermeture du compte et exécution des garanties, s’il y a lieu.

Malgré toute l’attention et les suivis mis en place, de mauvais payeurs peuvent se glisser entre les mailles du filet. Dans une telle situation, un créancier frustré devrait s’attarder aux avantages qu’il peut tirer d’une procédure en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI).

Utilisation de la LFI en matière de recouvrement

Peu d’entreprises ou de procureurs ont le réflexe de s’attarder sur les bénéfices pouvant être retirés de l’utilisation de la LFI. Les outils prévus à la LFI sont principalement la demande d’une ordonnance de mise en faillite et la demande visant la nomination d’un séquestre intérimaire. Ce dernier outil ne pourra exister que de façon concomitante à la demande de mise en faillite. Voici les principaux éléments à considérer de ces recours :

Demande pour l’obtention d’une ordonnance de mise en faillite (faillite forcée)

Par voie de demande au tribunal, un fournisseur dont le client est en défaut peut déposer cette demande s’il est en mesure de démontrer que :

  • Son client est endetté envers lui pour plus de mille dollars (1 000 $) et a obtenu un jugement.
  • Le débiteur a commis un acte de faillite dans les six mois qui précèdent le dépôt de la demande.
  • Les efforts de collection ont été suffisamment importants et ont échoué.

Afin d’appuyer sa requête, le fournisseur peut s’informer sur le dossier de crédit et consulter d’autres fournisseurs sur les habitudes de paiement du débiteur. Une demande peut être déposée conjointement avec un ou d’autres créanciers renforçant ainsi les arguments auprès du tribunal.

En matière d’insolvabilité, le système de justice prévoit un accès assez rapide aux tribunaux et dans un scénario où la contestation est faible, un jugement peut être obtenu dans un délai d’environ 30 jours.

La mise en faillite permet principalement :

  • Une liquidation ordonnée des biens.
  • Une distribution équitable des actifs, en vertu des droits et priorités que confère la LFI aux différents créanciers.
  • Un accès à l’information financière de l’entreprise et le pouvoir d’enquête du syndic, qui permet de détecter et de contester toute transaction suspecte et préjudiciable aux créanciers.

Demande pour la nomination d’un séquestre intérimaire

Au moment du dépôt d’une demande pour l’émission d’une ordonnance de mise en faillite, si le ou les créanciers ont des doutes importants concernant le risque de dilapidation des biens, ils peuvent demander à la Cour de nommer un séquestre intérimaire. Les fonctions principales du séquestre intérimaire sont de superviser la compagnie débitrice et de sauvegarder ses biens. Il agit comme un chien de garde des créanciers.

Le séquestre intérimaire aura les pouvoirs et responsabilités que lui dictera le tribunal. Selon les circonstances, il peut s’agir seulement du contrôle des recettes et débours aussi bien que de la prise de possession complète des actifs appartenant à la débitrice. Le but étant d’empêcher la disposition d’actif hors du cours normal des affaires.

Le séquestre intérimaire pourra rendre des comptes au tribunal et demander des instructions si la situation le nécessite.

Impact pour le créancier requérant

Bien qu’il s’agisse d’un véhicule intéressant pour protéger les actifs disponibles pour distribution aux créanciers, la mise en faillite et la nomination d’un séquestre intérimaire restent des procédures relativement rares.

Une étude de risque approfondie doit être faite avant d’enclencher la procédure pour s’assurer de plusieurs points :

  • Les coûts rattachés au processus.
  • Le risque d’échec de la demande et les dommages éventuels qui peuvent être réclamés dans une telle situation.
  • Les chances de récupération après la liquidation des biens.
  • Le risque politique d’une telle démarche.

Résumé

La demande de mise en faillite et la demande visant la nomination d’un séquestre intérimaire sont des outils qui sont d’un très grand intérêt lorsque vient le temps de faire face à un débiteur « ratoureux » ou « ultra‑négligent ». Toutefois, il est nécessaire de faire une bonne évaluation des risques et avantages avant d’enclencher de tels processus.

Une consultation rapide avec un syndic en insolvabilité permet d’avoir une meilleure vision du dossier et des risques inhérents.

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Pour en savoir davantage, contactez l’équipe d’insolvabilité au 1 866 833-1054.

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